Journal du samedi 9 juin 2001 (Carrion de los Condes) :
L’étape a été courte et facile. J’ai marché seul et j’avais le temps ; C’était très agréable. A la pose café du matin, dans un petit village j’ai rencontré Jésus, le tenancier d’un petit bar. Nous avons longuement conversé et je l’ai photographié. Il a 43 ans et il semble prendre plaisir à philosopher et refaire le monde avec les étrangers de passage.
Un peu plus loin, au village de Villalcazar de Sirga j’ai visité l’église Santa Maria la Blanca (XIIIe) dédiée à la Vierge Blanche. Lors de la visite une étrange sensation m’a envahi, une émotion inexplicable qui m’a submergé jusqu’aux larmes. Un peu plus tôt dans la journée, je m’étais arrêté dans une petite chapelle où trônait une vierge éclairée en contrejour par une ouverture à l’Est. La lumière y était très particulière. J’ai fait comme une prière, demandant pourquoi tant de souffrance sur mon chemin. C’est Jésus, le tenancier du petit troquet, qui m’apporta la réponse un peu plus tard : "...sur le chemin on n’a que les souffrances que l’on s’impose..." Et c’est vrai que rien ne m’obligeait à poursuivre lors des signes annonciateurs des tendinites ou des ampoules. J’aurais pu m’arrêter et laisser mon corps récupérer.
Dans notre discussion il a eu une autre formule qui m’a plu : "Ce pèlerinage (el camino) c’est une halte dans la vie quotidienne..."